Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

 

Evo et Alvaro au palais présidentiel dimanche soir 

 

jeudi 23 octobre

Ce matin, jeudi 23 octobre, le décompte des résultats du vote aux élections générales font apparaître une différence de 9,44% sur 96,61% des votes comptabilisés par le tribunal électoral. Si ces chiffres devaient se maintenir, Evo Moralès serait contraint à un deuxième tour contre Carlos Mesa. Dans ce cas la victoire ne serait pas acquise pour l’actuel président au pouvoir depuis 2006. En effet, les autres candidats de droite extrême se sont ralliés à Carlos Mesa, le candidat conservateur qui avait été chassé en 2005. Le processus de diffusion du décompte rapide des voix a été interrompu brusquement dimanche soir au prétexte qu’il créait la confusion, alors que la différence entre les deux candidats arrivés en tête était de 7% environ sur 83% des voix dépouillées. Il a repris lundi matin et fait apparaître alors une différence de 10,11% su 95 % de votes. Déjà, l’interruption avait provoqué des remous et pour le coup la confusion. Mesa réclamait immédiatement un deuxième tour qui l’aurait avantagé, tandis que le MAS et Moralès lors de son intervention au palais présidentiel[1], laissait entendre de manière assez ambiguë, qu’il était le gagnant dès le premier tour, grâce au peuple bolivien, contre le néo libéralisme. Ce sont ces déclarations avant la proclamation des résultats définitifs sur 100 % des suffrages qui ont créé la confusion.

Une confusion et un doute sur la crédibilité de ces nouveaux résultats qui ont fait la part belle à l’opposition et engendré une perte de confiance dans le pays. Il aurait suffi d’attendre les résultats complets au lieu de jouer les fiers à bras de part et d’autre. Le gouvernement, trop sûr de lui, habitué à toujours gagné avec ses scores impressionnants, 61% aux élections précédentes, a exprimé une crainte, manqué de clarté et a raté sa communication, alors que d’évidence il avait perdu la confiance d’une partie importante de ses électeurs pour des raisons que j’ai déjà évoquées précédemment. Il suffisait d’attendre les résultats complets, d’autant plus que les derniers provenant du vote paysan et indigène ne pouvaient qu’être favorables à Evo qui a beaucoup fait pour cette population longtemps ignorée. Il a créé des écoles, des centres de santé, et un terrain de football dans chaque village. C'est une des raisons, semble t-il,  pour laquelle les résultats se sont modifiés. Et ils peuvent changer encore dans un scrutin aussi serré. Enfin serré, n'exagérons rien, beaucoup de nos candidats en France aimeraient avoir entre 47 et 48 % au premier tour. Les syndicats de paysans ont d’ailleurs déclaré qu’ils allaient venir manifester dans une descente sur La Paz, pour soutenir Evo et contre une droite qui veut ignorer leur existence comme au bon vieux temps, pas si lointain, où ils n'avaient pas le droit de vote. Le MAS de La PAZ manifeste aujourd'hui à midi sur la place San Francisco, dans les calme, la dignité, sans provocation, contre le néo-libéralisme, ont dit ses dirigeants à la manif de l’après-midi de mercredi, avant de se disperser pour éviter tout affrontement avec la droite[2].

Carlos Mesa sait tout cela, il est de mauvaise foi quand il exige un deuxième tour sans attendre le décompte définitif. Il est le premier responsable des manifestations violentes avec son allié d'extrême droite Ortiz qui a envoyé ses troupes de choc pour provoquer des incidents dont ils pourront tirer parti devant l’opinion internationale comme bolivienne. Ils ont organisé la retape dans les écoles et les universités, pour faire descendre les lycéens et les étudiants dans la rue. Ces jeunes gens de la classe bourgeoise, pour la plupart, ne sont pas tous des fascistes ou des gens embrigadés à droite. Mais ils n'ont connu que l’omnipotence du MAS, Evo et Alvaro. Une partie des classes populaires, grâce à la politique de croissance et de développement du régime, à la redistribution des richesses produites (pour la plupart extractives), ne semblent plus se souvenir d’où elles viennent. Mais surtout, la confiance s’est étiolée en EVO qui se présente pour la quatrième fois alors qu'il a perdu le référendum qu’il avait provoqué pour pouvoir se présenter à nouveau. Ce n’est pas une tare de se présenter indéfiniment, çà marchait comme çà en France avant la réforme de Jospin et Chirac. Ne pas confondre avec une présidence à vie comme on l’entend souvent, surtout quand il s’agit des pays non occidentaux.

 

Manifestants de droite, jeunes gans avec 

la présence d'activistes extrêmes masqués

 

Ci-dessous des partisans du MAS

 

Evo et Alvaro auraient dû se chercher des successeurs au lieu de compter sur un charisme en voie de disparition pour une partie importante de la population.

Avant de quitter le pays, malgré les appels à la grève générale de Mesa et consorts, la situation semblait plutôt calme après de durs affrontements avec les forces de l’ordre dans plusieurs villes de province. Des Tribunaux électoraux et des permanences du Mas ont été brûlés, des personnes blessées, dont une jeune fille de 16 ans, hier à La Paz, dont le pronostic est réservé. Elle ne devait pas s'attendre à ces violences.

Après cela, Mesa, l’hypocrite, ou l’inconscient, demande lui aussi de manifester dans le calme, sans affrontement. Mais il s'est allié avec le diable...

 

L’enjeu international, en particulier pour les Etats-Unis, est de profiter de cette situation pour discréditer le dernier régime bolivarien qui jouissait d’une grande popularité. Ainsi, par un petit coup d’Etat constitutionnel par ci, un autre par là, ils auront réussi à renverser beaucoup de ces empêcheurs d’exploiter, dans leur pré carré américain, Cette fois sans utiliser l'armée comme avec Pinochet, ça fait mauvais genre, mais la presse, les manipulations, la justice. Et, il faut reconnaître que certains gouvernements de gauche, radicale ou pas, ont prêté le flanc à ces grandes manœuvres impérialistes. Cependant, les peuples acquièrent une conscience politique, et les amis de Trump, au Chili, en Argentine et en Equateur, ont du souci à se faire. On verra dimanche 27 avec l'Argentine où Christina Kirchner pourrait revenir au pouvoir, cette fois comme Vice-présidente.

 

Vendredi 25 octobre

Cette fois le décompte est sûr, établi sur 99,99% des suffrages. Evo Moralès obtient 47,7 % des voix contre 36,51% à Carlos Mesa, son rival direct soit un écart de 10,56 %. Constitutionnellement, Evo Moralès est reconduit pour un quatrième mandat, que cela plaise ou pas à ses adversaires, au gouvernement américain, aux régimes néo-libéraux du continent comme à ceux des pays occidentaux. Donc, il est vain de réclamer un deuxième tour qui serait inconstitutionnel, sauf à vouloir déstabiliser le pays. Une autre élection pourrait avoir lieu s’il s’avérait qu’il y a eu fraude, après une vérification à laquelle le gouvernement bolivien ne s’oppose pas. Les cris d’orfraie et les souhaits fallacieux non dénués de mauvaise intention ne servent à rien, sinon créer du désordre.

Le gouvernement du MAS et Evo ont néanmoins senti le vent du boulet passé tout près. Ils doivent en tirer les conséquences et agir pour retrouver une confiance perdue auprès de la moitié de la population. Ce président qui a réussi, avec une économie en plein développement, une amélioration des conditions de vie sans équivalent depuis l’indépendance, un recul sans précédent de la pauvreté, doit s’interroger sur cette perte de confiance, cette suspicion. Le pays sort divisé de l’épreuve électorale, sans doute une de trop pour le tandem Moralès- Linera ; c’est le principal reproche qui lui est fait. Le pays est aussi coupé en deux géographiquement avec quatre provinces toutes situées à l’Ouest acquises à l’opposition et cinq à l’Est à la majorité présidentielle.

Le prochain gouvernement ne disposera plus que d’une courte majorité à l’Assemblée avec 51 % d’élus, députés et sénateurs. Il ne disposera plus de la majorité des deux tiers.

Le capital moral est atteint pour Evo qui avait réussi l’exploit d’unifier un Etat pluriethnique, si ce n’est de réconcilier les classes sociales, qui lui avait permis de gouverner sur un consensus plurinational. Treize ans d’un gouvernement progressiste sans coup d’Etat, sans massacre de masse, pour un pays qui en avait connu 177 en 160 ans, c’est un exploit qu’il faut porter à son crédit, sans autorité excessive, mais cependant avec une présence devenue massive, omniprésente du MAS, qui n’est cependant pas un parti unique, puisque tous les partis ont pu se présenter librement à l’élection. Les manifestations sont autorisées et ne sont réprimées que lorsqu’elles dérivent en violences, comme les incendies de tribunaux électoraux et de permanence du MAS. La répression contre les gilets jaunes en France a été bien plus violente.

Donc, inutile de crier à la dictature.

 

Le bulletin de vote est présenté devant l'électeur et les spectateurs à la table de vote

On vote pour le Président, les députés, les sénateurs.

Le vote est obligatoire; une attestation est délivrée à son issu. 

Tout le monde peut contrôler toutes les opérations comme moi-m^me ait pu y accéder librement

 

 

      Allain Graux

Le 25 octobre 2019

 

 

[1] Où j’étais présent

[2] J’y étais également

Tag(s) : #AMERIQUE LATINE, #géopolitique
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :