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« Le droit de nature pour ce qui concerne proprement le genre humain est déterminé par la puissance de chacun, ce droit sera en réalité inexistant ou du moins n’aura qu’une existence purement théorique puisqu’on n’a aucun moyen assuré de le conserver. Il est certain aussi que chacun a d’autant moins de pouvoir et par suite d’autant moins de droit qu’il a plus de raisons de craindre. Ajoutons que sans l’entraide les hommes ne peuvent guère entretenir leur vie et cultiver leur âme. Nous arrivons donc à cette conclusion : que le droit de nature, pour ce qui concerne proprement le genre humain, peut difficilement se concevoir sinon quand les hommes ont des droits communs, des terres qu’ils peuvent habiter et cultiver ensemble, quand ils peuvent veiller au maintien de leur puissance, se protéger, repousser toute violence et vivre suivant une volonté commune à tous. Plus grand en effet sera le nombre de ceux qui se seront ainsi réunis en un corps, plus aussi ils auront en commun de droit. Et si les scolastiques, pour cette raison que des hommes à l’état de nature ne peuvent guère être leurs propres maîtres, ont voulu appeler l’homme un animal sociable, je n’ai rien à leur objecter.

Quand des hommes ont des droits communs et que tous sont conduits comme par une seule pensée, il est certain que chacun a d’autant moins de droit que tous les autres réunis l’emportent sur lui en puissance, c’est-à-dire que chacun n’a en réalité de droit sur la nature, qu’autant que lui en confère la loi commune. Tout ce, d’autre part, qui lui est commandé par une volonté commune, il est tenu de le faire ou encore  on a le droit de l’y obliger.

 

Ce droit que définit la puissance du nombre, on a coutume de l’appeler pouvoir public, et celui-là possède absolument ce pouvoir, qui, par la volonté générale, a le soin de la chose publique, c’est-à-dire le soin d’établir, d’interpréter, et d’abroger les lois, de défendre les villes, de décider de la guerre et de la paix, etc. Si ce soin appartient à une assemblée composée de toute la masse, le pouvoir public est appelé démocratie. Si l’Assemblée se compose de quelques personnes choisies, on a l’aristocratie, et si enfin le soin de la chose publique et conséquemment le pouvoir appartient à un seul, alors c’est ce qu’on appelle monarchie[1] ».

 

En ces temps, où non seulement le monarque constitutionnel et ses féaux du pouvoir et de l’Assemblée Nationale, refuse toute négociation, tout amendement et veulent même les diminuer par une nouvelle réforme, pour s’accommoder de soi-disant concertations qui ne sont que des apparences démocratiques, des illusion destinées à masquer le caractère libéralement funeste et restrictif des projets macroniens, je conseille, je leur conseille de relire ces lignes de Spinoza et de réfléchir sur la notion de Bien commun, du bien social et de la nature humaine. Mais aussi à nos citoyens de se rappeler que les hommes, ces êtres sociaux, peuvent mieux assurer leurs droits individuels quand ils se rassemblent dans un collectif.

 Allain Graux

le18 mars 2018

 

 

[1] Spinoza – Traité politique.

 

 

Tag(s) : #POLITIQUE
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