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La dette, L’IMPOT, et les revenus

Dans notre société, l’impôt devrait avoir un effet redistributeur pour pallier aux inégalités de revenu engendrées par le système économique capitaliste, des inégalités qui se sont accrues considérablement depuis le tournant libéral et financier de la globalisation marchande qui a suivi le « choc pétrolier de 1973[1] ».

Les inégalités de revenus[2] se sont accrues au cours des dix dernières années. Le revenu annuel moyen des 10 % les plus modestes s’est élevé de 400 euros entre 2000 et 2010, celui des 10 % les plus riches de 8 950 euros.

Entre 2000 et 2010, le niveau de vie moyen mensuel des 10 % les plus pauvres a progressé de 5,4 % soit 34 euros, une fois l’inflation déduite. Le niveau de vie moyen mensuel des 10 % les plus riches a augmenté de 18,9 % soit 746 euros. L’écart relatif entre ces deux catégories a augmenté : en 2010, les plus modestes touchent 7 fois moins que les plus aisés, contre 6,3 fois moins en 2000. En valeur absolue, l’écart est passé de 3 308 en 2000 à 4 021 euros en 2010. En moyenne, les 10 % les plus riches ont gagné 700 euros nets supplémentaires chaque mois de 2000 à 2010.

Entre 2004 et 2010, les 0,01 % les plus riches ont vu leur revenu annuel s’accroître de plus de 179 000 euros (données avant impôts). Les inégalités se sont aussi accrues au niveau des 10 % les plus riches : le neuvième décile a touché 2 400 euros de plus en six ans, ce qui reste modeste rapporté aux 0,01 % les plus riches (+ 178 900 euros).

Une grande partie des revenus les plus élevés sont issus de revenus financiers, fortement volatils.

Face à la concurrence des pays en voie de développement (PEV) ou émergents, à celle de tous les nouveaux tigres du monde, avec leurs bas-salaires et l’absence ou le peu de droits sociaux, les entreprises françaises qui travaillent à l’exportation ou des secteurs qui subissent des importations de biens de consommation à bas-coûts (textile, électronique, jouets, grande distribution …), ne paient pas leurs salariés en fonction de ce qui leur est nécessaire pour renouveler leur force de travail, nourrir, éduquer, soigner leurs enfants. L’Etat intervient - ou pas, ou peu – pour compenser ce manque par la protection et l’aide sociale et les services publics. C’est à cela, entre autres (police, justice, armée, culture), que servent les impôts.

De nos jours, particulièrement depuis 2008, pour payer une dette créée en grande partie par la spéculation financière des banques et la fraude, l’Etat solférinien, tout comme le précédent sarkoziste, n’assume pas ce rôle de redistribution que les électeurs de gauche qui ont élu François Hollande à la présidence de la république attendaient de lui.

Pourtant les fonds existent, ils sont dans la poche des actionnaires dont les dividendes qu’ils perçoivent ne cessent de croître, contrairement aux revenus des plus modestes. Le gouvernement solférinien accorde ses faveurs aux entreprises, 20 milliards de cadeaux, pour baisser le « coût du travail », c’est-à-dire la part du salaire social qu’il devrait redistribuer aux plus défavorisés, pour une compétitivité irréaliste qui n’aura d’effet que d’aubaine pour les plus gros requins. Sur ces 20 milliards donnés aux entreprises, 10 seront prélevés directement dans la poche des contribuables par la hausse de la TVA au 1 janvier 2014.

« Les entreprises françaises distribuent aujourd’hui 7 fois plus de dividendes qu’il y a 20 ans (9% de la valeur ajoutée, record depuis la seconde Guerre mondiale)[3].

Sous prétexte de concurrence libre et « complètement faussée », dans le cadre libéral de l’Union européenne, de fuites éventuelles vers des paradis fiscaux - qui devaient disparaître – le gouvernement de Messieurs Ayrault et Moscovici, se refusent à taxer véritablement ces revenus financiers exorbitants. Ils préfèrent augmenter la TVA, une fiscalité injuste qui alourdit la note pour les plus pauvres. La TVA représente 47,6 % des prélèvements pour un ménage avec un revenu annuel de 38 000€, soit 3 455€ pour 892€ d’impôts sur le revenu et 1731 € d’impôts locaux[4].

Ces 6 milliards d’euros de taxes supplémentaires diminueront encore le pouvoir d’achat de 0,35% en moyenne, provoqueront une accentuation de la crise de la demande sur laquelle repose majoritairement l’économie française. Ils sont censés financer en partie les 20 milliards d’euros d’allégements de l’impôt sur les sociétés, or «66 % des entreprises sont confrontées à une crise de la demande. La politique de stimulation de l’offre financée par un choc de demande négatif ne fera qu’empirer la situation», comme le rappelle Éric Heyer, chef du département des prévisions à l’Observatoire français des conjonctures économiques (Ofce)[5].

Ce gouvernement préfère diminuer les dépenses sociales pour « aider les entreprises à créer de l’activité, une croissance génératrice d’emploi ». Sauf que les entreprises imposent aux contribuables de financer leurs taux de profits : les plus grandes bénéficient annuellement de plus de 30 milliards € d’exonérations de cotisations sociales et 172 de niches fiscales. Bref, ce nouveau cadre financier contribue à l’explosion de la part du capital dans le revenu national (de 25 % en 1980 à 35 % en 2010)[6].

Paradoxal non ? On marche sur la tête ! Non, c’est la logique libérale malheureusement adoptée par un parti qui pour le coup ne devrait plus être appelé socialiste et par des Verts dont on se demande ce qu’ils font encore à ramer dans cette galère.

L’équilibre

Quand on gouverne il faut choisir. En matière d’égalité, une devise qui figure sur le fronton de nos mairies, soit on relève les salaires pour payer à leur juste valeur tous les salariés pour qu’ils puissent vivre de leurs revenus, eux et leur famille. Mais pour ne pas provoquer de faillites pour les entreprises directement confrontées à la concurrence internationale, il conviendrait de fermer les frontières économiques de la France ou de l’Union Européenne, de taxer certaines marchandises produites à bas coût social et salarial. Ce n’est pas ,le chemin qui est pris puisque le traité transatlantique va ouvrir encore plus notre économie aux entreprises du continent Nord-américain (USA-Canada-Mexique). « S’il devait entrer en vigueur, les privilèges des multinationales prendraient force de loi et lieraient pour de bon les mains des gouvernants. Imperméable aux alternances politiques et aux mobilisations populaires, il s’appliquerait de gré ou de force, puisque ses dispositions ne pourraient être amendées qu’avec le consentement unanime des pays signataires[7]. »

Selon cet accord, des multinationales pourraient traîner en justice les gouvernements dont l’orientation politique aurait pour effet d’amoindrir leurs profits, obtenir une généreuse compensation pour le manque à gagner induit par un droit du travail trop contraignant ou par une législation environnementale trop spoliatrice.

Cet accord est un retour de l’AMI (Accord multilatéral sur l’investissement) négocié secrètement entre 1995 et 1997 par les vingt-neuf Etats membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Divulguée in extremis, notamment par Le Monde diplomatique, la copie souleva une vague de protestations sans précédent, contraignant ses promoteurs à la remiser[8].

Mais que faire si on ne revalorise pas les salaires pour ne pas subir la concurrence libre et non faussée ? Il faut compenser le manque à gagner par une politique de redistribution sous forme d’aides, d’un système de protection social et de services publics…Donc d’avoir des recettes fiscales suffisantes et choisir dans quelle poche on les prélève. La boucle est bouclée. On tourne en rond me direz-vous !

L’alternative.

Il y a une alternative, et ce n’est évidemment pas celle du FN. Ceux qui sont tentés, par désespérance et manque de confiance envers ceux qui les ont déjà trompés, seraient à nouveau très fortement déçus, par les solutions que ce parti d’extrême-droite susurre à votre oreille, en masquant leurs origines fascisantes (Ordre Nouveau) et leurs perspectives liberticides. La sortie unilatérale de l’Euro, le protectionnisme intégral, l’expulsion massive des immigrés[9], ne créeraient que le chaos et engendreraient un autoritarisme dont ils espèrent bien tirer profit avec leurs copains de la droite extrême de l’UMP, pour remettre en cause tous projets d’émancipation de notre société. Tous les économistes sérieux s’accordent pour le démontrer. Le programme du Fn, ce n’est pas sérieux.

Selon un sondage BVA réalisé du 16 au 19/10/2013 :

- 58% des Français estiment qu’une société juste doit réduire les inégalités.

- 82 % qu’elle doit couvrir les besoins de base.

-76 % estiment que les plus démunis doivent bénéficier prioritairement des dépenses sociales.

L’écosocialisme proposé par le FRONT DE GAUCHE, répond à ces souhaits, c’est un projet dans le prolongement du programme « l’Humain d’abord » de Jean Luc Mélenchon, candidat à l’élection présidentielle, dans la revendication universelle d’une planète vivable pour tous les êtres vivants. Il implique de revoir nos choix de production et de consommation énergétique, de rechercher des filières vertes, de repenser l’agriculture, d’organiser le transfert modal en privilégiant le fret ferroviaire et fluvial, d’imaginer la reconversion de notre outil industriel et de refuser la publicité et l’obsolescence programmée. Bref, mener une déflation vigoureuse du capital.

Son ambition consiste à replacer la question du capital, son coût, son allocation, son appropriation, au centre de la politique. Deux axes y président : abaisser son coût pour définanciariser l’économie (reconquérir le marché intérieur, relancer la recherche et développement, réorienter l’épargne nationale vers les investissements productifs et les besoins sociaux) ; socialiser le capital, via des outils fiscaux (« révolution fiscale » : 14 tranches d’impôt sur le revenu, progressifs et proportionnel, au lieu de le ramener à 3 comme l’envisage le pouvoir actuel…) permettant d’élargir l’assiette d’imposition des revenus du capital, et des outils juridiques (« socialisation progressive ») permettant à plus long terme d’assurer un renversement de la propriété et un véritable pouvoir des salariés, exercé sous le contrôle de la Nation. Enfin l’enjeu démocratique dépasse le strict cadre des entreprises et rejoint l’urgence démocratique, devant l’émergence d’une société de rentiers, où l’héritage remplace le mérite, où les champs politiques et médiatiques sont captés par des fraudeurs et des corrompus aux patrimoines exorbitants.

La dette ne sera pas payée, tout le monde le sait. Mais on continue à faire comme si afin de persuader le bon peuple qu’il faut la payer et que seules des mesures d’austérité s’imposent. Sans doute pour mourir guéris ! La dette, dont il faudrait réaliser l’audit – comme l’ont fait des pays comme l’Equateur, le Venezuela, la Bolivie, l’Argentine – est un piège destiné à baisser les dépenses sociales et publiques.

Allain Graux

Le 3 décembre 2013

[1] Le premier choc pétrolier débute en 1971 avec le pic de production de pétrole aux États-Unis et l'abandon du système de Bretton Woods. En 1973, une déclaration d'embargo des pays arabes membres de l'OPEP accélère la hausse de prix du baril, suite à la guerre du Kippour Les 16 et 17 octobre 1973 entre Israël et l'Égypte et la Syrie.

[2] Les inégalités de revenus - Observatoire des inégalités- http://www.inegalites.fr/spip.php?article632

[3] Hadrien Toucel et Nolwenn Neveu : http://lepartidegauche.fr/arguments/argument/le-probleme-c-est-le-cout-capital-25792#sthash.S2RkmNzw.dpuf

[4] Insee – enquêtes ménages, ministère des finances.

[5] L’Humanité - 28 Novembre, 2013

[6] Hadrien Toucel et Nolwenn Neveu – déjà cité.

[7] Lori M. Wallach, Le monde Diplomatique - novembre 2013

[8] Source : ibid

[9] Il n’est que de consulter les statistiques pour comprendre que Marine Le Pen ment avec impudence pour tout ce qui concerne l’immigration. En fait les immigrés, illégaux ou pas, rapportent plus globalement qu’ils ne coûtent à la société française, et la France est le 2° pays de la plus faible immigration en Europe : La Norvège, l'Italie ou l'Espagne ont une proportion d'immigrés plus de deux fois supérieure à la nôtre. « Que l'on raisonne en stock ou en flux, la France compte parmi les pays européens où l'immigration est la plus faible.», explique Georges Lemaître, économiste spécialiste des migrations à l'OCDE. (Les Echos n° 20919 du 26 Avril 2011 • page 10)

« Pour autant, même si en moyenne les immigrés semblent payer moins de taxes et recevoir plus de transferts que les natifs, la différence de structure par âge de la population immigrée, regroupée dans les classes d'âge actives, [...] conduit à une contribution nette moyenne des immigrés au budget de l'Etat supérieure à celle des natifs », selon Lionel Ragot.

« l'immigration réduit le fardeau fiscal du vieillissement démographique, soutient Lionel Ragot, et sans cet apport, dans l'hypothèse d'une immigration zéro, le besoin de financement de la protection sociale à l'horizon du siècle passerait de 3 % à environ 5 % du PIB ».

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