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Chapitre I

Pour la gauche, la priorité devrait-être de procurer un emploi à ces 4,5 millions de personnes inscrites à Pôle emploi, dont 1,8 millions depuis plus d’un an. Car la question qui se pose pour tous les précaires, qu’ils soient chômeurs[1] ou à temps partiels[2], c’est de travailler et avec des salaires[3]  qui leurs permettent de vivre décemment, s’alimenter, se soigner, éduquer leurs enfants correctement. Certainement pas pour l’immense majorité d’entre eux, se contenter des indemnités du chômage ou des minima sociaux, du RSA[4].

Que propose la majorité de droite au pouvoir depuis 2002 pour remédier à cette situation dont elle est responsable. Elle provoque la misère de plus de 8,2 millions de gens qui survivent en-dessous du seuil de pauvreté[5] ?

Elle tente de culpabiliser les chômeurs, les salariés malades, en accréditant l’idée que ce sont des fraudeurs. Si la fraude aux allocations existe, elle ne touche qu’une très infime minorité d’individus et elle est bien moins importante que celle des entreprises et des riches[6] contre laquelle il ne prend pas de mesures. La récupération  des sommes fraudées permettrait de rembourser le montant des intérêts de la dette annuelle[7] de la France…

Contrairement à ce que l'on croit, ce ne sont pas les particuliers qui fraudent le plus, mais les entreprises. «Des estimations existent désormais pour les fraudes aux prestations familiales et logement (1 à 1,4 %), les fraudes aux cotisations sociales (5 à 6%) et à la TVA (6 à 7,5%)»[8]. Qui a dit cela : Jean Luc Mélenchon, Bernard Thibault ? Non, c’était François Baroin, alors ministre du budget. On peut le croire…

Et pourtant, que propose l’UMP dans son programme : elle fustige la «fraude» et veut créer une «carte sociale sécurisée», biométrique, qui regrouperait « les informations ouvrant des droits (état civil, situation familiale et professionnelle, etc.)». C’est l'amorce d'un fichage généralisé de la population, une mesure prônée également par le Front National.

L’UMP dénonçe une prétendue « préférence française pour l'indemnisation passive ». « La France a le modèle social le plus généreux des pays de l'OCDE[9] ». Mais c’est justement grâce à ce filet de protection que la France a mieux résisté à la crise, grâce à ce qui reste de services publics et de la protection sociale. Et c’est justement ce que Sarkozy veut diminuer ou supprimer ! Pourtant les minima sociaux ne représentent que 1/5° des dépenses de la sécurité sociale.

Si certaines aides sont réservées aux plus pauvres, éventuellement bénéficiaires des minima sociaux (aides à la cantine scolaire, transports, etc., elles sont le fait des collectivités locales et ne relèvent donc pas de la solidarité nationale. En France, les minima sociaux (et notamment le RMI devenu RSA) sont parmi les plus faibles d’Europe. Un très influent conseiller de Nicolas Sarkozy, Patrick Buisson[10], a proposé une grande loi de réhabilitation du travail ; il proposait de «réserver le RSA aux bénéficiaires qui ont un travail». Or parmi les 1,8 million d'allocataires de l'ex-RMI, seuls 650.000 sont dans ce cas. Si une telle mesure était votée, plus d'un million se verraient donc privés de ressources… Laurent Wauquiez, annonçait une proposition de loi conditionnant le versement du RSA à «cinq heures de travail social» par semaine – non rémunérées – pour éviter que «le RSA ne se transforme en nouvelle prestation d'assistanat». Le ministre ajoutait même qu'il entendait également plafonner les minima sociaux à 75% du Smic.[11] En définitive, l'UMP propose la fusion de la prime pour l'emploi et de la partie activité du RSA ; elle souhaite que les revenus « sociaux » (minima sociaux + droits connexes) ne dépassent pas 75 % du Smic ! Soit 791€ par mois…Peut-on vivre décemment avec de telles indemnités ?

Autre sujet fustigé par l’UMP : les 35 heures ! Toujours dans la même veine : les Français ne travailleraient pas assez, moins que les autres européens. Ce qui est totalement faux ! Si la durée conventionnelle de la semaine de travail de 35 heures est bien la plus faible d'Europe, les Français travaillent bien plus en moyenne : 41 heures pour les personnes à temps complet[12]. C'est plus qu'en Suède, au Danemark, en Irlande, en Finlande, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Allemagne. De l'autre côté du Rhin, pays tant vanté, on ne travaille que... 35,8 heures par semaine en moyenne. Si, l'on prend en compte l'ensemble des actifs (temps partiels compris), la durée moyenne du travail des Français est de 38 heures selon l'OCDE.

La réalité, c’est que dans le système actuel en France, il y a de moins en moins d’emplois. Il est donc nécessaire de partager le travail existant, ainsi que les revenus de la valeur créée, afin que tous puissent vivre décemment et équitablement. C’était l’idée des 35 heures, et même si les mesures d’application de la loi de Martine Aubry n’ont pas été parfaites, les économistes les plus objectifs s’accordent à penser qu’elle a créé plus de 500 000 emplois, sans compter les emplois indirects, la rationalisation du travail, l’augmentation de la productivité. Et justement en matière de productivité, le travailleur français est le plus performant au monde. Il faut aussi observer que :

-En France 80 % des femmes ont un emploi (ce n’est pas le cas en Allemagne). Cela ne les empêche pas de faire des enfants (record d’Europe de la natalité, avec l’Irlande), grâce aux crèches et aux allocations familiales que Sarkozy et ses affidés veulent remettre en cause. Avant les 40 heures, les femmes étaient majoritairement au foyer, pour élever les enfants et s’adonner aux travaux ménagers. Quand elles avaient un emploi, c’était en attendant le mariage, ou c’était considéré comme un salaire d’appoint. C’est une des raisons de la discrimination en matière d’écart de salaire qu’elles subissent encore. La question n’est pas de renvoyer les femmes aux fourneaux, aux couches et à la lessive, mais de partager le travail et donc d’en réduire sa durée, journalière, hebdomadaire, annuel, de vie.

-Mettre de l’humain dans les rapports sociaux, de travail, de vie, c’est aussi ne pas remplacer les hommes et les femmes par des machines quand cela n’est pas nécessaire. C’est plus agréable, au guichet, au téléphone, de parler à une personne, plutôt qu’à un automate. Et c’est plus facile de régler certains problèmes avec un gardien d’immeuble, de parler avec une caissière plutôt que d’affronter une « scannette’ de supermarché, sur les autoroutes, etc…Et tous ces emplois ne sont pas «décentralisables », sauf en ce qui concerne les centres d’appels téléphoniques. En voilà une grande réussite que ces centres d’appels, souvent situés à l’étranger, dont les postes sont occupés par des employés qui ne savent - la plupart du temps, et ce n’est pas leur faute - que répéter un scénario appris par cœur et sont incapables de régler votre problème. Dans les entreprises, vous tombez sur des serveurs redoutables dont il vous faut, payer la communication ! Bonne façon d’éviter les réclamations, tellement ces procédures sont rebutantes ! Cette pratique a été généralisée dans les administrations, certes avec ces numéros gratuits.

Un scénario libéral extrême !

La logique de ce gouvernement est de tout privatiser, diminuer, réduire ce qui est collectif, fait sens et société, pour ne laisser aux individus que le choix de payer un service, s’il en a les moyens. En poussant cette logique à l’extrême, les femmes resteront à la maison, pour élever les enfants, pourquoi pas les instruire aussi, cela ferait encore moins d’enseignants dans le primaire. Ensuite, après un examen pour le passage dans l’enseignement secondaire, les meilleurs seraient orientés vers des lycées, pour un enseignement long jusqu’au Bac, l’excellence pourrait ensuite accéder aux grandes écoles et aux universités autonomes et privées avec des droits d’inscription différenciés selon des critères d’évaluation compétitive. Les autres, la grande masse, seraient déployés dans des centres d’apprentissage, dans les usines, les entreprises et les commerces, chez les artisans, pour passer un CAP en fonction des besoins définis par le MEDEF et la CGPME, voire la FNSEA pour l’agriculture. Nul n’est besoin d’enseigner des matières comme l’histoire, la géographie, la littérature à des enfants destinés à accomplir des gestes robotisés. Pour la culture, la télé suffira, avec une chaîne diffusant des jeux, du sport, des feuilletons, de la « téléréalité » et une chaîne officielle pour la propagande gouvernementale. Les autres seraient hématiques et payantes…accessibles aux élites instruites et possédantes. Les services de santé seront assurés par des réseaux de cliniques privées, les grands hôpitaux publics assureront les soins courants et la recherche (financée par l’Etat et mise au service des laboratoires et des mandarins médicaux). Transports, distribution de l’énergie électrique, communications (poste), tout sera privatisé. L’administration de l’Etat sera réduite aux acquêts des fonctions régaliennes : armée, police (dont l’essentiel des forces seront municipales), soit un nombre minimal de fonctionnaires. Ainsi toutes les marges - de profits - seront enfin dégagées pour le grand marché transatlantique, pour affronter la concurrence planétaire libre et non faussée…

Ce scénario est-il utopique, ubuesque dans une France livrée complètement, sans entrave, au sarkozisme ? A suivre…

      

- Le 20 janvier 2012 -



[1] Indemnité chômage : Le montant brut de l'indemnité chômage est égale à la plus élevée des deux sommes suivantes :
- 57,4% du Salaire Journalier Référence,  ou bien 40,4% du SJR + 11,34 € par jour.
Attention : l'allocation brute journalière ne peut être inférieure à 27,66 €, ni supérieure à 75% du SJR.

La durée d'indemnisation est égale à la durée d'affiliation pendant laquelle le demandeur d'emploi a été en activité. Elle est comprise entre une durée minimale de 122 jours (environ quatre mois) et une durée maximale de 730 jours (environ 24 mois). Pour les salariés privés d'emploi âgés de 50 ans ou plus à la date de fin de leur contrat de travail, la durée maximale est portée à 1 095 jours (36 mois et demi). Par exception, les allocataires âgés de 61 ans et plus continuent d'être indemnisés jusqu'à ce qu'ils puissent bénéficier d'une retraite à taux plein s'ils sont indemnisés.

[2] Temps partiel ( source INSEE 01.2012-): 1 219 400 hommes, 1.349 800 femmes - 25 693 00 au total - en moyenne en 2010, 1 604 000 femmes vivant seules ont un emploi ; 79,8 % travaillent à temps complet et 20,2 % travaillent à temps partiel.

[3] SMIC brut: 1393,82 € - 1.055,42 € net ( janvier 2012)

[4] RSA : 466.99 € y compris l’allocation logement. Par rapport au revenu médian, le RMI a perdu 34% depuis le début des années 1990»

[5] En France, un individu peut être considéré comme "pauvre" quand ses revenus mensuels sont inférieurs à 795 ou 954 € (données 2009) selon la définition de la pauvreté utilisée (seuil à 50 % ou à 60 % du niveau de vie médian. Le revenu pris en compte est le revenu dit "disponible" : après impôts et prestations sociales.

[6] Fraude fiscale : 70 milliards d’Euros.

[7] Chaque année, la dette coûte environ 50 milliards d'Euros : c'est l'équivalent de 20% du budget de l'Etat, soit 89% de l'impôt sur le revenu ou encore 140% de l'impôt sur les sociétés qui sert à payer les intérêts de la dette nationale

[8] Le Figaro - 14.12.2010

[9] La dépense sociale représente en effet 28,7 % du PIB – source OCDE janvier 2012.

Selon une étude INSEE de 2007, «les montants des revenus minima garantis aux personnes pauvres sont beaucoup plus élevés» dans les onze autres pays européens étudiés: «de 30 à 40 % au Royaume-Uni et en Finlande, de l'ordre de 50 à 75 % en Irlande, Suède, Belgique et Pays-Bas, environ le double en Norvège et en Islande, environ le double pour les couples et environ 140 % pour les parents isolés en Autriche, et de l'ordre de 150 % au Danemark ».

[10] Patrick Buisson , ancien de Minute, journal d’extrême-droite…

[11] la tribune.fr - 14/04/2011

[12] INSEE

Tag(s) : #politique
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