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Introduction

Vous pourrez-lire ci-dessous un aspect trop peu conu des tentatives fascisantes dans le milieun paysan de n'entre-deux guerres, en particulier avec Henri Dorgères qui fût un adepte du poujadisme où il s'associa avec un ceratin Jean Marie Le Pen, élu député poujadiste tout comme lui...

Jusqu’en 1920, la paysannerie représentait 1/3 de la population française et la principale force électorale, plutôt favorable à la droite, aux radicaux, parfois à l’extrême-gauche, aux socialistes et aux communistes dans le Sud. Le syndicalisme agricole était divisé en deux branches, l’une républicaine, l’autre socialiste.

Le Parti agraire et paysan français est fondé en novembre 1927 par Gabriel Fleurant[1]qui se fait appeler Fleurant-Agricola ; il est le président de l'Union des paysans de l'Oise. Son organe, « La Voix de la terre », affiche des convictions corporatistes et « apolitiques : le blé, le lait, le vin, le bétail, la charrue n'ont pas d'opinion politique », et anticommunistes, car le communisme est opposé à la propriété privée. Le PAPF est aussi contre les cartels capitalistes qui exploitent les petits paysans.

Le premier congrès se tient à Paris en janvier 1929. Le but affiché de rassembler la paysannerie française se heurte à la concurrence de la droite classique très ancrée dans ce monde de petits propriétaires traditionnalistes. Le PAPF n’a qu’un élu en 1932, mais 10 en 1936, le monde paysan étant effrayé par le Front Populaire. En Côte d’Or, Pierre Mathé bat le socialiste Henri Guenin dans la circonscription de Nuits Saint Georges. En 1934, il a rejoint le Front paysan dirigé par Henri-Auguste d'Halluin dit Henri Dorgères et Jacques Le Roy Ladurie[2], le secrétaire général de l'Union nationale des syndicats agricoles (UNSA). Henri Dorgères[3] avait fondé les Comités de défense paysanne et les dota d'un bras armé en 1935, « les Chemises vertes » chargées de manifester en cas de vente sur saisie et de s'opposer aux grèves des salariés agricoles en devenant, le cas échéant, des « volontaires de la moisson ». Henri Dorgères est arrêté alors qu'il tente de s'opposer à la vente aux enchères des biens d'un cultivateur, il est, ainsi, condamné, le 21 août 1933, à trois mois de prison ferme par le tribunal de Péronne, et interné à la prison d'Amiens. Il sera inculpé à plus de 60 reprises. En 1935, dans son premier livre, ‘Haut les Fourches », il précise : " Notre programme ne comprend qu'un seul paragraphe : aimant passionnément notre pays, nous voulons une France forte et prospère, une France débarrassée des partis et des politiciens qui l'ont affaiblie et ruinée, une France où les deux réalités de notre vie : le métier et la famille seront souveraines[4]...

Henri Dorgères créa d'abord en 1929 le « Comité de défense paysanne contre les assurances sociales » en Ille-et-Vilaine (opposé à la loi du 5 avril 1928, qui étendait le bénéfice des assurances sociales aux ouvriers agricoles). Henri Dorgères qui n’était pas paysan mais fils de boucher est devenu un journaliste formé à l’art oratoire par ses études de droit ; c’était un homme d'action. Après le Comité de défense paysanne en 1929, le Front paysan en 1934, les Jeunesses paysannes puis les Chemises vertes, en 1935 il est devenu le secrétaire général de la ‘Ligue des paysans de France’ et le délégué à la propagande du ‘Syndicat agricole de défense paysanne’. « Il se dotera en outre d'un appareil de propagande très efficace à travers de nombreuses publications agricoles parmi lesquelles ‘Le cri du sol’ et ‘Haut les fourches’ ! organe de ses Jeunesses paysannes[5].

« Il y a comme un écho du fascisme dans l'exaltation de la force et de la résistance physique chez Dorgères, ses constants appels à l'action, au "nettoyage", au sacrifice, à l'unité, à l'héroïsme, et à son goût pour l'humiliation de l'ennemi[6]. Finalement, la volonté de créer une mobilisation se fondant plus sur les passions que sur la raison constitue une des marques de l'approche fasciste de la politique. Cependant, conclut Paxton, les conditions objectives d'épanouissement d'un fascisme rural, et en particulier la structure des opportunités politiques, ne permettaient pas l'essor d'un mouvement fasciste en France. L'autorité des notables locaux n'avait pas été suffisamment déstabilisée pour qu'ils soient contraints de s'allier à Dorgères. La puissance de l'État français n'avait pas été assez ébranlée pour offrir au mouvement une ouverture politique suffisante, contrairement aux paysans italiens, qui faute de réponses de la part de l'État seront tentés par la solution fasciste. Le dorgérisme va décliner pour ne pas avoir assuré le passage de la revendication du corporatisme à celle de la cogestion telle qu'elle sera mise en place par la Corporation paysanne sous Vichy puis aménagée par la FNSEA dans l'après-guerre.[]

…L'approche de Paxton n'est pas totalement novatrice. Dès 1975, Pascal Ory faisait un constat identique dans un article consacré au dorgérisme : «Auraient donc seuls droit au nom fatidique les fascismes noir, brun ou acier, couleurs de la ville, et pour être fasciste faudrait-il avoir réussi ?»

R. O. Paxton, dans son ouvrage, ‘Le temps des chemises vertes’ permet de cerner la spécificité d'un fascisme à la française et l'existence ou non, selon une image convenue, d'un «anticorps au gène fasciste» présent au sein de notre culture politique []… Concernant la question du fascisme, «ce livre part [...] de la prémisse suivante : c'est dans les campagnes que l'on peut le mieux étudier les limites d'un fascisme français dans les années trente» (p. 16).[]… Selon lui, l'étude du fascisme se doit d'aborder l'ensemble des classes sociales et en particulier la classe paysanne. La comparaison avec d'autres pays atteste du rôle des classes paysannes dans l'avènement des régimes fascistes. À titre d'exemple, dans un manifeste électoral du NSDAP pour l'élection présidentielle de 1932, Hitler écrit sous le titre Sauver la paysannerie c'est sauver la nation allemande : «J'estime en outre que la conservation et la promotion d'une saine paysannerie est la meilleure protection contre les maladies sociales et la déchéance raciale de notre peuple» (cité par Reich (W.), La psychologie de masse du fascisme, Paris, Payot, 1972, p. 74)[7] ».

Le PAPF s’est divisé en 1936, entre une aile gauche anticapitaliste qui fonde le Parti républicain agraire et social (PAS) animé par Louis Guillon, le seul élu du parti à la Chambre depuis 1932, et Pierre Mathé qui regroupe l'aile droite et dirige le PAPF depuis la mort de Fleurant Agricola. La droite est proche des négociants ; elle adhère au Front Paysan, un rassemblement des syndicats paysans, sorte de modèle du syndicalisme agricole qui fédère les milieux paysans autour des grands propriétaires.

En 1868 avait été créée la ‘Société des agriculteurs de France’ devenue en 1886 ‘l'Union centrale des syndicats agricoles de France’ et en 1880 la ‘Société nationale d'encouragement à l'agriculture’, par des notables d'inspiration catholique, sans être encore de véritables syndicats, d'ailleurs illégaux à ces dates. C’est seulement après 1884 que tous les syndicats furent autorisés.

En décembre 1904, fut créée une Fédération horticole qui rassemblait les ouvriers, jardiniers, maraîchers, champignonnistes et le personnel des cimetières de la Seine. Elle subsista jusqu'en 1914. Des syndicats ouvriers agricoles sont créés en 1908 : le « Syndicat des ouvriers bûcherons du Centre » et le « Syndicat des ouvriers agricoles du Midi »[8]. « C'est en 1906 qu'apparurent les premières organisations syndicales dans le Nord de la France. Au congrès de Melun le 6 janvier 1907 se décida la constitution de la Fédération des agricoles de la région du Nord. Elle connut de grandes difficultés et finit par fusionner le 1er janvier 1911 avec la Fédération agricole et horticole. En novembre 1913 les vignerons de la Marne tinrent leur premier congrès. Ce congrès décida l'adhésion à la CGT et se prononça pour l'unité terrienne[9] ». Ces syndicats de travailleurs n’avaient évidemment rien en commun avec les syndicats des exploitants, et ils se rattachèrent au syndicalisme ouvrier, à la CGT, à la gauche.

L'UNSA (Union nationale des syndicats agricoles), est issue de l’Union centrale des syndicats agricoles de France. Elle a été fondée en 1934 par opposition aux dirigeants des Chambres d'agriculture et de ceux de la vieille « Société des agriculteurs de France » de la rue d'Athènes à Paris. Elle regroupe 1 200 000 familles paysannes en 1937. Par anticommunisme, l'UNSA s'oppose au Front populaire, accusé de préparer l'étatisation de l'agriculture (création de l'Office national du blé[10]) et dénonce la CGT et les « gréviculteurs[11] ».

Le, syndicalisme agricole, c’est aussi un mouvement important de défense des intérêts sous forme de coopération, caisses de crédit, formation. La Société nationale d'encouragement à l'agriculture (SNEA) avait été fondée en 1880, sous l'impulsion de Gambetta pour concurrencer La Société des agriculteurs de France (SAF) créée en 1867. Tous les mouvements initiés par la SNEA se sont regroupés en 1912 au sein de la Fédération nationale de la mutualité et de la coopération agricole. La concurrence a été vive entre la SAF (association de personnes) et la SNEA (association d'intérêts), à tel point que beaucoup de villages possédaient des syndicats des deux bords à la veille de la Première Guerre mondiale. L'efficacité de ce double associationnisme rural a créé un maillage dense de syndicats :

De 5 syndicats en 1884, le monde rural est passé à 4948 et 512 794 adhérents en 1914 et 14 968 avec 1 910 538 adhérents en 1930.

Pour Jacques Leroy-Ladurie, les parlementaires sont des escargots baveux attelés aux chariots mérovingiens. Cet antiparlementaire sera néanmoins élu député du Calvados, à deux reprises (1951-1956, 1958-1962). Il préconisait une société corporatiste « génératrice d’une cité nouvelle arrachée aux politiciens stupides et impuissants. » Selon l’historien américain Robert Paxton, le langage de Ladurie ne serait pas celui d’un fasciste mais plutôt celui d’un corporatiste monarchiste et chrétien.

Dorgères avait rallié le soutien de nobles propriétaires attachés à l’Action française comme le Duc d’Harcourt, comte de Guébriant, mais surtout des exploitants familiaux radicalisés par la chute des prix agricoles. Il dénonçait aussi les parlementaires corrompus - « A droite des nouilles, à gauche des fripouilles »[12]- qui sacrifiaient « l’agriculture aux intérêts de la finance juive ». Ces dirigeants professaient en commun un antisémitisme pour livrer des boucs émissaires à la vindicte paysanne et abattre la République plutôt que défendre les intérêts des agriculteurs. Dorgères dénonçait aussi la « féodalité fonctionnariste », un discours populiste, futur fondement du poujadisme auquel il se rattachera avec Jean Marie Le Pen à partir de 1953. Mais le monde paysan, bien que très important à l’époque, avait besoin du monde urbain pour la prise du pouvoir. Or après les émeutes fascisantes de 1934, il devint clair aux yeux de beaucoup de paysans que ce mode d’action n’était pas destiné à satisfaire leurs revendications matérielles.

Jacques Le Roy Ladurie avec l'UNSA, permit de recentrer l’action autour des valeurs paysannes. Ces valeurs tenaient peu compte de la situation des journaliers qui, dans l'Ouest dormaient encore sur une planche dans l'étable[13] des fermes familiales… Et les discours de vanter « le paysan robuste, moralement et physiquement tenace, nourri aux sources du bon sens, habitué à la vie dure, incertaine, pénible. Malheur donc aux citadins, par essence dégénérés. C'est par conséquent à des paysans que devrait revenir le soin de diriger l'Etat nouveau dont la France aurait besoin, un État basé sur la corporation [14].

Ces discours, parfois contradictoires, sont incapables de transformer les aspirations de leurs auteurs en un projet cohérent. Dorgères proposa aux fermiers, de faire la grève alors qu’il avait dénoncé les gréviculteurs, de cesser de livrer leur production, de payer l'impôt, de retirer leurs économies des caisses afin de priver l'État de liquidités. Conscient néanmoins des limites idéologiques de leur « conscience de classe » et de leur volonté d’en découdre, il leur proposait de cultiver l’antiparlementarisme par des tentatives d'éviction des parlementaires des campagnes, mais en précisant qu'il ne s'agissait « ni de tuer ni de blesser les parlementaires, mais de leur botter vigoureusement le derrière[15]. »

Il avait créé les Jeunesses paysannes, les chemises vertes, pour disposer de troupes disciplinées dans un milieu qui tenait par-dessus tout à sa liberté, et avait subi la dure réalité militaire dans les tranchées. Cela déplut assez aux plus âgés qui voyaient d'un mauvais œil le port d'un uniforme par ces jeunes[16].

« On pourrait être tenté de croire que le dorgérisme toucha essentiellement de jeunes agriculteurs, ou tout au plus une frange de la population rurale sensible à un discours « musclé ». Or il n'en était rien. Les adhérents ou sympathisants reflètaient la composition des populations rurales (n'était-ce l'absence des femmes), tant pour ce qui est de l'âge que pour ce qui est de la profession (dans une moindre mesure). Tous les âges étaient en effet représentés, de vingt à quatre-vingts ans, avec une date de naissance moyenne établie à 1891 (pour les abonnés et les souscripteurs) ou 1896 (pour les adhérents, du fait de l'influence des Jeunesses Paysannes). Les différentes classes d'âge se répartissaient de façon régulière, n'était-ce le creux très net marquant les générations 1885-90, qui payèrent le plus lourd tribut à la Première Guerre Mondiale.

La composition sociale des militants dorgéristes rappelle celle des campagnes, avec évidemment une forte représentation de cultivateurs. « Ainsi ceux-ci dominent largement la masse des souscripteurs (70,6 %), suivis de très loin par les propriétaires (15 %), les professions non agricoles (8,5 %) et les ouvriers agricoles (6 %). Ces proportions se retrouvent à peu de choses près chez les adhérents. Comme la catégorie « non agricole » recouvre une très grande diversité de professions, nous pensons pouvoir dire que la Défense Paysanne sut mobiliser une large part de la population rurale autour de ses revendications, sans jamais que les cultivateurs ne perdent le rôle moteur[17] ».

Le Front Paysan put mobiliser contre les lois sociales du Front populaire : la semaine de 40 heures, les huit heures par jour, les congés payés. Toutes mesures dont ils étaient éloignés, qui semblaient inapplicables à l’agriculture et qui furent perçues comme un privilège accordé aux gens des villes, aux ouvriers. La loi sur les allocations familiales obligeait les patrons à cotiser pour leurs ouvriers, sans pouvoir eux-mêmes bénéficier de ces allocations ? Dans une profession où tout le monde était un petit peu patron, cela posait de sérieuses difficultés…

L'alliance entre dorgéristes et syndicalistes s’étiola néanmoins à partir de 1937. Les divergences s’accentuèrent autour de la question des allocations familiales entre L'UNSA qui désirait en voir confier la gestion à des organisations professionnelles (comme pour les assurances sociales), tandis que Dorgères qui en avait une vision étatiste et nationaliste, souhaitait qu’elles soient payées par l'État.

« Certains, tel Jacques Le Roy Ladurie, allèrent même très loin dans le partage des idées fascisantes de Dorgères. Puis, quand tous saisirent qu'au fond, ce que cherchaient les paysans était plus mesuré que ce dont parlait Dorgères, ils s'écartèrent de ce dernier.[18] »

A la dénonciation des fonctionnaires, à l’antisémitisme, ils ajoutaient la dénonciation de ceux qui spéculent, les monopoles, sans pour autant dénoncer le capitalisme, celui qui donne « du travail aux français », ils s’appuyaient sur des valeurs traditionnalistes dont le monde paysan était l’exemple : le travail, la famille, la patrie, et voulaient par la chute « naturelle » de la République, construire un Etat fort et corporatiste. Ce qui fut mis en œuvre sous Vichy et en Espagne avec Franco, au Portugal avec Salazar : des régimes fascistes et corporatistes… La Défense Paysanne, de Dorgères et Leroy Ladurie, n’était seulement un extrême agrarisme comme s’interroge Jean Luc Allais, mais bien une tentative de fascisation du monde paysan qui, dans le contexte social français de l’époque, n’a pas réussi.

«Dictature paysanne ! » C'est avec ce slogan que Dorgères, tenta d’enflammer les campagnes françaises. Quoique le comportement soit resté en retrait des slogans comme celui-ci : « Bras nus et mains pures, nous irons nettoyer Paris! ... Robert Paxton y voit plutôt un mouvement autoritaire antirépublicain, dans le champ magnétique du fascisme[19] ».

Pour Pierre Barral[20], les discours musclés relevaient plutôt de l’effet de tribune et d’une brutalité revendicative pour relever la dignité paysanne,, un antiétatisme qui n’était pas le fascisme.

Pascal Orry pense que Dorgères écrit des professions de foi fascistes en 1933, réclame la dictature et la formation de troupes d’assaut, qu’il s’agit donc bien d’affinités fascistes[21], proches des régimes de Salazar et Franco[22].

Paxton[23] note les affinités entre les Comités de défense paysans et le fascisme rural italien de 1920 qui opposa violemment les grands propriétaires de plaine du Pô aux syndicats d’ouvriers agricole. Mais pour lui, l’action de CDP en France relève plus de la défense de valeurs traditionnelles que « révolutionnaires » (au sens du courant de la révolution nationale fasciste), un antiétatisme et un corporatisme, mais sans milice armée, seulement des troupes de choc (les chemises vertes), épisodiquement.

« Pour Robert Paxton, les causes de l’insuccès du fascisme paysan sont multiples : elles tiennent à l'enracinement de la "République au village", chère à Maurice Aghulon, qui confine le dorgérisme à certaines zones géographiques, à l'ouest et au nord. Elles tiennent également à la solide implantation des notables français, laquelle leur permet de résister, mieux que leurs homologues allemands ou italiens, à la grande crise même si certains, comme Jacques Le Roy Ladurie, qui, avant de rejoindre le maquis, a été ministre de l'Agriculture du maréchal Pétain, seront tentés, un temps, par le dorgèrisme. Enfin, elles tiennent à l'intervention de l'Etat gouvernement de Front populaire compris, lequel protège les grands propriétaires contre les grèves et fait, au besoin, donner la troupe. "Volontaires des moissons" contre grèves agricoles, projets de contenir la "ceinture rouge" par une "ceinture verte" deviennent sans objet dès lors que gendarmerie et militaires suffisent à maintenir l'ordre dans les campagnes... » (Extrait d’un article de Nicolas Weil, Le Monde, 25 Octobre 1996)[24]. »

Ajoutons que dès 1938, comme nous l’avons constaté, avec le retour au pouvoir de la droite modérée, l’activisme n’intéresse plus les syndicalistes de l’Unsa. Ils se rallieront néanmoins à Pétain, avec Ladurie pendant la guerre, tout en ne jouant qu’un rôle secondaire dans le corporatisme vichyssois.

En 1950, les paysans manifesteront contre Mendès-France, les bouilleurs de cru, puis rallieront le Poujadisme comme Dorgères…Poujade est élu député en 1956 dans l’Ile et Vilaine où avait sévi Dorgères.

Mais l’UNSA a laissé la place à la Jeunesse agricole chrétienne (JAC), autrement dit à l'actuelle FNSEA[25], le principal syndicat d’exploitant agricole, dominé par les gros propriétaires d’Ile de France. Un autre syndicalisme est né de la lutte des petits éleveurs du Larzac de 1972 à 1981, la Confédération paysanne[26] dont l’animateur sera José Bové.

La FNSEA majoritaire était dirigée par des hommes proches de la droite ; elle est contestée, à partir de 1959, par un courant animé par des militants communistes, le Mouvement de défense et de coordination des exploitations familiales (MODEF). Après 1968, des militants souvent formés par la JAC (Jeunesse agricole catholique, puis chrétienne) ne rejoignent pas le MODEF, car ils veulent rester indépendants, tant vis-à-vis du Parti communiste français que du Parti socialiste ; ils sont plus proches soit du Parti socialiste unifié (PSU) et de la gauche extra-parlementaire. Sur le Larzac, ils seront rejoints par divers groupes maoïstes, libertaires....dont certains, comme Bové, s’y installeront définitivement.

Les PT, Paysans-Travailleurs, créent avec des syndicats départementaux indépendants la Confédération nationale des syndicats de travailleurs paysans (CNSTP) et le courant qui était restée dans la FNSEA donne naissance, en 1982, à la Fédération nationale des syndicats paysans (FNSP) ; avec le MODEF, ces gauches participent au ministère à la conférence annuelle de 1981, au grand dam de la FNSEA. Ils deviendront la Confédération paysanne.

Si je cite cela dans cet essai sur l’extrême-droite en France, c’est pour éviter de donner à penser que toute la paysannerie française pourrait être acquise exclusivement aux idées du conservatisme, à la droit et à son extrême, tant pour les petits exploitants familiaux que les ouvriers agricoles ( qui sont le plus souvent aujourd’hui des immigrés ou des saisonniers).

[1] Ancien professeur de collège

[2] Le Roy Ladurie est le père du célèbre historien Emmanuel Leroy Ladurie qui sera membre du PCF jusqu’en 1956, jusqu’à l’intervention de l’URSS en Hongrie.

[3] Henri-Auguste d’Halluin, dit Henri Dorgères, est né le 6 février 1897 à Wasquehal (Nord) et mort le 22 janvier 1985 à Yerres (Essonne). Son père, Léon Auguste Joseph d'Halluin, possédait une petite boucherie. Le jeune lycéen est très actif à l'encontre des occupants allemands, il est arrêté à trois reprises et notamment en janvier 1918 alors qu'il tente de passer en Hollande. Il est alors condamné et emprisonné à la forteresse de Bruges (4 février 1918), mais réussit à s'évader le 4 octobre. Cette action lui vaudra la Croix de guerre (1914-1918). Après un baccalauréat ès lettres, Henri d'Halluin suit pendant deux ans des études de droit. Mais il doit abandonner ses études pour entreprendre une carrière de journaliste. Nouvelliste de l'Ouest à Rennes en1922, il découvre les difficultés de la condition paysanne dont il devient un défenseur. Soutien de Pétain, il est nommé délégué général à l'organisation et à la propagande de la Corporation paysanne. Il publie en 1943 Révolution paysanne, où se précisent déjà un certain nombre de thèmes préfigurant le poujadisme : « Le fonctionnaire, voilà l’ennemi ». Il fut décoré de la francisque. Il est arrêté par les Alliés en août 1944 et emprisonné à Paris. Condamné à dix ans d'indignité nationale, il est amnistié pour services rendus à la Résistance et libéré le 26 avril 1946, car il fournissait des papiers d’identité aux prisonniers évadés et à des résistants. Il fut député de l'Ille-et-Vilaine de 1956 à 1958, élu sur des listes poujadistes.

[4] http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/biographies/IVRepublique/dorgeres-d-halluin-dit-henri-auguste-06021897.asp

[5] François Dreux- Centre de recherches administratives, politiques et sociales -Université Lille - Politix - Année 1999 - Volume 12 - Numéro 47 - p. 171

[6] Le temps des chemises vertes – Paxton- p. 255

[7] François Dreux- Centre de recherches administratives, politiques et sociales -Université Lille - Politix - Année 1999 - Volume 12 - Numéro 47 - p. 171 -172 – J’ai cité tout ce passage de l’article de F. Dreux, car il me paraît juste et pertinent.

[8] http://emmanuellemartin.pagesperso-orange.fr/telechargement/mst/picc2.pdf

[9] http://www.ihs.cgt.fr/IMG/pdf_Federation_nationale_des_travailleurs_de_l_agriculture.pdf

[10] Il a permis de stabiliser le marché de cette céréale alors essentielle et de garantir des revenus aux producteurs. Il a développé les coopératives agricoles et la construction de silos de stockage.

[11] Dorgères à propos de syndicats d’ouvriers agricoles.

[12] H. Dorgères, Le Progrès Agricole de l'Ouest (PAO), 14 février 1937.

[13] Jean-Luc Allais - Annales de Normandie – Année 1997 - Volume 47 - Numéro 47-3 - pp. 243-264

[14] Ibid

[15] H. Dorgères, Haut les fourches, Paris, 1935, p. 179

[16] Jean-Luc Allais - Annales de Normandie - Année 1997 - Volume 47 - Numéro - 47-3 lien p.252

[17] Ibid - P 257

[18] Ibid - P.264

[19] Le Temps des Chemises vertes, Révoltes paysannes et fascisme rural, 1929-1939, par Robert O. Paxton

[20] Pierre Barral – (Historien) -Les agrariens français de Méline à Pisani – A. Collin 1968 .p.241

[21] Voir Moissons rouges: les socialistes français et la société paysanne durant l'entre-deux guerres 1918-1940

Par Edouard Lynch. P.213

[22] Pascal Orry – (Historien) – du fascisme- Perrin. janvier 2003

[23] Robert Paxton – Le temps des chemises vertes - Éditions du Seuil, 1996

[24] http://www.bibliomonde.com/livre/temps-des-chemises-vertes-2642.html

[25] La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), fondée en 1946, est le syndicat professionnel majoritaire dans la profession agricole en France qui représentait 54,9 % aux élections Chambres d’agriculture en 2007. La FNSEA trouve son origine dans la Confédération générale de l'agriculture mise en place à partir de 1943 par François Tanguy-Prigent, qui s'opposa à la Corporation paysanne mise en place par le Régime de Vichy.

Wikipédia.

[26] La Confédération paysanne est née officiellement en 1987. Elle est le fruit de la réunion de deux syndicats minoritaires, la FNSP et la CNSTP. La Confédération paysanne a obtenu 19,7 % des voix lors des dernières élections aux chambres d'agriculture en 2013. Elle avait obtenu 26,82 % en 2001. Wikipédia

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